Les gardiens

vendredi 10 octobre 2008
par  Paul Jeanzé
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Je ne suis rien, je le sais, mais je compose mon rien avec un petit morceau de tout.

J’ai passé tant de temps entre leurs mains. Combien de fois me suis-je retrouvé dans cette cage en contrebas des Pitons du Tonnerre, la capitale tauren. Des heures pendant lesquelles j’étais l’objet de toutes les attentions : jets de pierres, crachats, insultes principalement, sous un soleil de plomb, sans boire, ni manger.

Quand j’y repense, c’est presque mon meilleur souvenir de ma vie de prisonnier de la Horde. Les Taurens semblent avoir de nombreux points communs avec notre race, mais leur Capitale reste le point de passage obligé pour les créatures les plus innommables que compose cette armée improbable.

Le reste de mon temps, je le passais dans un profond cachot de Reflet-de-Lune. Les conditions de ma détention étaient mauvaises, certes, mais aucune maltraitance physique de la part de mes geôliers, comme si j’avais pu avoir un peu d’importance à leurs yeux.

Combien de temps ai-je pu passer en ces lieux ? Une éternité vraisemblablement, dans de tels moments, on oublie complètement toute notion du temps qui passe.

Un matin, j’ai l’impression que l’on vient me chercher plus tôt qu’à l’accoutumée (j’ai droit tous les matins à une petite promenade dans la cour de la prison) mes geôliers me conduisent à un elfe de sang que je n’ai encore jamais vu. Comme tous ces congénères, brille dans ses yeux une lueur étrange, mêlant haine et désespoir. Il me semble que dans cet être, cette dernière lueur est encore plus prononcée.

Pendant un voyage qui aura sans doute duré des jours, je suis emmené au cœur de Fossoyeuse, la cité des morts-vivants, et plus précisément, dans le quartier des apothicaires. S’ensuit une discussion animée entre l’elfe et le responsable des lieux. Je comprends avec effroi (oui, avec tout ce temps passé à la foire, je parviens à comprendre le langage de nos ennemis) que l’apothicaire a besoin de moi pour mener des expériences, expériences qui auraient été mandatés par Varymathras lui‑même ! Je n’ai pas le temps de penser à ce qui pourrait m’arriver que je reçois un coup sur la nuque et plonge dans le néant.

Quand je me réveille, je suis allongé sur un brancard tenu par deux énormes orcs. Mon bras droit me fait atrocement souffrir. Je parviens à peine à le soulever et constate avec horreur qu’à sa place je ne vois qu’une longue plaie violacée. Ma tête me fait horriblement souffrir, je m’évanouis à de nombreuses reprises. À un moment, je crois reconnaître les abords des moulins de Tarrens. Je m’évanouis encore une fois.

Je reprends connaissance au moment où le brancard tombe lourdement au sol. Des bruits de bataille. Je vois des nains… les orcs prennent la fuite… Un visage puant la vinasse se penche sur moi… Je vais mourir, c’est certain…

Un an a passé. Je ne sais comment j’ai pu être ramené, mais je suis chez moi, à Teldrassil. Chez moi… J’ai bien du mal à dire que je suis chez moi. Aussi étrange que cela puisse paraître, si je me souviens assez bien de ma période de captivité, je suis incapable de me rappeler ma terre natale. Je ne me souviens pas du lieu où je suis né, j’ai oublié que je venais sans doute de quelque part de ces forêts, à tel point que sur la route qui m’a mené il y a quelques jours à Dolanaar, je me suis fait berner par une satyre…

Heureusement, je commence de nouveau à entrer en communion avec cette nature, Notre Nature. Je sais qu’ici, rien n’est plus comme avant, qu’un grand malheur rôde et que ma destinée est de comprendre ce Mal et de le détruire.

On m’attend près du Lac Al’Ameth. La corruption commence à s’abattre en plein cœur de Teldrassil et on a besoin de moi là-bas. Mais plus je vais avancer dans ma quête et plus les dangers seront dangereux. Mais pour l’instant, je me sens seul, désespéramment seul. Qu’Elune me vienne en aide afin que je puisse rencontrer des frères et des sœurs…

Azeroth, 10 octobre 2008


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